Jessica Aigle, une voix pétillante

On l’entend avant de la voir. Une voix qui pétille, qui s’envole dans les aigus ou s’ancre dans des graves inattendus, toujours avec une justesse qui semble effortless. Jessica Aigle, comédienne franco-américaine et figure montante du doublage, est de ces artistes qui ne rentrent pas dans une case. Entre les micros des studios lyonnais, les répétitions avec son groupe de musique et ses escapades pour croquer des lézards au crayon ou les observer au soleil, elle vit sa vie comme une partition : libre, instinctive, vibrante.

Le doublage, une évidence inattendue

Jessica n’avait pas prévu de faire du doublage son métier.

« C’est venu comme ça »,

raconte-t-elle avec un sourire en coin, presque surprise de sa propre trajectoire. Après quelques petits contrats, elle se forme auprès de deux institutions du milieu, O’bahamas et Anatole, et plonge dans cet univers en 2017. Depuis, elle enchaîne les sessions, parfois brèves, parfois intenses, d’une à trois heures, où elle donne vie à des personnages.

« Ce n’est pas ma voix qui mène la danse, c’est le rôle. Je me glisse dans sa peau, et ça sort tout seul. »

Pas de rituels compliqués avant une séance : Jessica travaille sa voix au naturel, au fil de ses chansons ou de ses conversations.

« Sauf si je dois crier, là, je fais gaffe. Mais c’est rare. »

Cette spontanéité, c’est sa marque de fabrique, celle qui fait d’elle une comédienne à part.

 

Une artiste aux mille visages

Si le doublage est son terrain de jeu principal, Jessica est loin de se limiter au micro. Chanteuse dans un groupe, elle explore les nuances de sa voix sur scène, sans se prendre la tête avec des exercices techniques. Dessinatrice à ses heures, elle griffonne avec la même liberté qu’elle met dans ses interprétations. Et puis, il y a les lézards.

« Après une session, je vais souvent les observer près du studio. Ça me ressource, c’est tout simple. »

Une pause dans la nature, un moment pour souffler, loin des projecteurs qu’elle évite sciemment :

« Le théâtre ? Trop de flemme », plaisante-t-elle.

L’ombre de l’IA : un cri du cœur

Quand on aborde l’intelligence artificielle, le ton de Jessica change. Loin de la nonchalance joyeuse, elle devient incisive.

« L’IA dans le doublage, c’est de la merde. Un robot qui débite un texte sans âme, sans intention, ça ne fait pas le poids. »

Si elle reconnaît utiliser l’IA comme outil dans son travail artistique, elle refuse de la voir remplacer les comédiens.

« On est déjà dans un milieu précaire, un petit écosystème. Les IA, ça risque de tout bousiller, surtout pour les indépendants comme moi. »

Pourtant, Jessica garde une lueur d’espoir.

« Les voix artificielles sonnent cheap, dystopiques. Je crois que les gens finiront par vouloir du vrai, de l’humain. »

En attendant, elle continue de prêter sa voix à des personnages qui, sans elle, n’auraient pas cette étincelle. Et entre deux enregistrements, elle retourne à ses passions : chanter, dessiner, ou simplement contempler un lézard qui se dore au soleil.

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